La dissuasion cyber peut-elle exister ?

Le CIENS a tenu son atelier de recherche mardi 13 mai au cours duquel Marie-Gabrielle Bertran, post-doctorante cyber a présenté ses recherches sur l’histoire de la pensée stratégique et plus particulièrement sur les liens entre cyber et nucléaire en explorant la possibilité d’envisager le cyber comme un outil de dissuasion et de contre-prolifération nucléaire. 

À partir de la lecture d’auteurs anglo-saxons comme Martin Libicki, universitaire américain expert de la dissuasion cyber, elle a passé en revue les points de convergence et les différences. 

Le cyber est considéré comme faisant partie du bas du spectre de la conflictualité tandis que le nucléaire est situé en haut du spectre (au-delà de la guerre conventionnelle). Le cyber est caractérisé par un usage fréquent et répété, tandis que le nucléaire se veut par excellence le domaine du non-usage. 

Pourtant, les penseurs de la « dissuasion cyber » (“cyber deterrence”) ont eu tendance à faire l’analogie entre nucléaire et cyber en raison de cette représentation stratégique qui situe les deux domaines comme étant en-dehors de la guerre, bien que relevant du conflit entre les États.

Le programme malveillant Stuxnet

Des éléments historiques et conjoncturels amènent aussi à penser le lien entre ces deux domaines, comme la construction de l’Internet, un réseau de communication numérique qui devait assurer la persistance des communications militaires des États-Unis en cas de frappe nucléaire, et le cas du programme Stuxnet. 

Ce programme malveillant conçu par la NSA et utilisé contre des centrifugeuses d’enrichissement d’uranium en Iran entre 2007 et 2010 visait peut-être à dissuader l’Iran de développer ses capacités nucléaires, en tout cas à ralentir ce processus. Le cyber a possiblement été employé ici comme un outil de contre-prolifération.

Ces réflexions visent à nourrir l’axe trois de recherche du CIENS qui porte sur les nouvelles conflictualités et l’avenir de la dissuasion avec les sous-axes suivants, 1) cyber et espace extra-atmosphérique, 2) technologies, IA et nouveaux risques d’escalade et 3) avenir de la guerre et de la dissuasion. 
Prochaine séance, le 27 mai avec la présentation des travaux d’Eve Benhamou, doctorante en Histoire des relations internationales à l’Université Sorbonne Nouvelle qui prépare une thèse portant sur la politique française à l’égard du conflit israélo-palestinien dans les années 2002-2017.

Marie-Gabrielle Bertran